Je te fiche mon billet que ce n’est pas si difficile d’écrire un billet d’humeur. Inutile de se mettre la pression ou d’invoquer les esprits des maîtres du genre que l’on écoute dans les matinales radio.
Alors que la chronique nécessite un peu de préparation et de documentation autour d’un sujet, avec le choix d’un angle notamment, le billet repose sur la narration d’une histoire. Un travail d’écriture qui débute avec une matière première que l’on connaît bien : soi-même.
Qu’elle soit bonne ou mauvaise, massacrante, joyeuse, chafouine ou badine, votre humeur ne s’échappe jamais. Sachez donc la dompter. Lors de la formation Sprint Podcast, nous commençons souvent par cet exercice proche de la maïeutique. Une série de questions déclenche la prise de parole, d’abord de manière anodine : Comment vas-tu ? De quelle humeur es-tu ? Y a-t-il eu, dans ta journée ou ta semaine, un événement heureux, ou au contraire, quelque chose qui t’a agacé ?
Puis viennent des questions plus profondes, notamment pour celles et ceux qui portent un projet de podcast : Pourquoi est-ce que c’est toi, ici, à cet instant précis, pour CE podcast, sur CE sujet ? Quelle est TA raison de faire ce podcast ? Quelle est la raison d’être de ce podcast en gestation ?
Se lancer dans l’écriture, sans détour
Vient ensuite le moment de faire face à la feuille blanche. Plusieurs stratégies sont possibles pour l’affronter :
La première consiste à écrire un jet spontané, sans chercher à tout contrôler. C’est bien connu, c’est en faisant qu’on avance. Et les tâtonnements font partie du processus. Dans cette phase, il ne faut rien s’interdire : approfondir un fait, un événement, une émotion, une idée, jusqu’au bout… mais aussi s’autoriser à bifurquer, emprunter d’autres chemins. L’essentiel est de noter ses idées, d’abord de manière anarchique, puis progressivement plus organisée (par thèmes, moments, histoires, anecdotes).
Une autre technique, que j’applique parfois en atelier radio avec des ados, repose sur l’utilisation de mots-clés. Elle consiste à accompagner son cheminement de pensée à l’oral en notant des mots-clés sur une feuille. Dans un premier temps, ces mots apparaissent dans l’ordre de la prise de parole, parfois numérotés. Puis on peut ajouter des flèches, changer l’ordre, observer les répétitions porteuses de sens ou s’en débarrasser, supprimer, compléter… et enfin réorganiser le tout dans une nouvelle version.
Écrire, c'est réécrire
Quelle que soit la technique d’écriture, les premiers maillons de l’histoire se tissent, avec leurs liens de causalité, leurs anecdotes et leurs personnages. À ce stade, ce ne sont plus des réflexions brutes, mais des choix d’écriture réfléchis, puis re-challengés.
C’est au fil des réécritures que naît le billet d’humeur définitif, avec ses ruptures assumées, ses ellipses, ses analogies… et pourquoi pas une digression ou un élément perturbateur pour capter l’attention des auditeurs et auditrices ?
Écrire à voix haute, parler et écrire
Le billet d’humeur est aussi un objet d’oralité. Alors, tout est permis pour se rapprocher au plus tôt de la forme sonore. On ne sacralise pas l’écriture : on la malaxe, on la porte avec nos mots, notre rythme, notre voix, notre souffle, en choisissant notre ton
Je dis souvent que le meilleur son, c’est le ton au naturel 🙂.
Ancrer son récit dans l’écriture, pour mieux l’ancrer dans son corps au moment de l’enregistrement. Pour porter ce que l’on a à dire… Pas forcément plus fort que les autres, mais plus loin. Jusqu’à cet auditeur, cette auditrice, qui nous écoute, là, quelque part, dans le réceptacle de l’écoute.